« Que faire de sa vie dans la vie ? » Texte d'un misanthrope
Au fond de cette question se cache une réalité. La vie n’a pas d’utilité. C’est une nécessité. Logiquement si nous ne vivons pas, nous ne permettons pas la survie de notre espèce. Mais de façon plus personnelle, est-il obligatoire d’y donner un sens dans la reproduction et dans la survie ? Ne peut-on pas se dévouer à un idéal qui peut venir à l’encontre des règles de vie ? Tout simplement non, car nous vivons par besoin pour certains et par nécessité pour d’autres dans une communauté. Le critère de société n’est pas un essentiel en soi. Nous pouvons en tant qu’être humain appartenir à une communauté et progresser ensemble sans se soucier de la société qui représente la majorité dans ce monde, cette majorité qui est sujet à des guerres inutiles et meurtrières.
Est-ce que rendre service à autrui est une preuve d’humanité ? Dans ce cas, cela devrait suffire à accepter son prochain. A respecter son statut de simple être vivant, limité à la reproduction, aidant les autres à accéder à cette possibilité né d’un désir ou encore une fois d’une nécessité. En somme, donner un sens à sa piètre existence. Ne pas trasailler toute sa vie par les blessures et les actes d’ignorances infligées par les autres n’est pas une tâche aisée et provoque le conflit au sein de l’espèce. Mais ce n’est pas mon cas. Bourré de rancœur et d’amertume, mon cœur ne parvient à pardonner et je ne peux avoir le sentiment de désirer une vie heureuse et amoureuse car elle me semble inaccessible et interdite n’étant pas en accord avec les règles humaines.
Misanthrope, voilà ce que je suis. Je n’ai pas demandé à l’être et je ne souhaite aucunement le rester. Après tout, personne ne peut se dire un jour « j’ai décidé à titré de ce jour d’être misanthrope ! ». Non, la psychologie humaine est bien plus complexe qu’elle n’y paraît. Celui ou celle qui pense avoir tout compris ne peut prétendre comprendre ses semblables mais savoir ce qu’il attend de la vie et faire en sorte que sa vie est un sens n’est pas impossible. C’est paradoxal lorsque l’on est misanthrope mais à force d’observer ses semblables on ne parvient plus à nous situer, on ne parvient plus à trouver sa place parmi ceux qui pensent avoir tout compris. Ces gens-là je les envies énormément, baigné dans l’ignorance et dans l’insouciance d’un futur sombre qu’il perçoive comme ils le veulent, à leur image… quitte à ce que cette vision ne soit pas conforme pas à la réalité.
Sombrer est inévitable dans le cas de ce que les croyants appellent une âme égarée. Dans mon cas ce n’est pas de la religion que je me suis éloigné mais des principes mêmes qui font que la vie mérite d’être, soit disant, vécue. Que faire lorsque ce n’est pas une notion évidente qui se manifeste d’elle-même en regardant les autres y parvenir ? Que faire de sa vie quand celle-ci est au point mort, que l’on se trouve dans l’incapacité d’avancer, dans l’incapacité d’aimer ou de savourer la présence d’un être cher parce que soi-même on ne s’accepte pas ? Comment est-ce possible de ne pas ressentir de compensation pour l’espèce humaine alors que j’y appartiens malgré moi, à défaut de fonctionner comme la moyenne d’entre nous ? Tant de questions que seuls les fous ou les égarés se posent. Ne pas chercher les questions sans réponses cela revient à vivre sa vie comme on l’entend. Un désir pour moi, une normalité pour les autres. J’envie l’homme banal et insouciant.
C’est ce que je veux mais je n’y parviendrais jamais car je suis rongé jusqu’à l’os, mon cerveau est malade et je suis atteint par cette empathie envers moi-même. Oui, je comprends ma douleur mais je suis incapable d’y remédier. Paradoxal, n’est-ce pas ? C’est pourquoi j’ai tendance à me dire à tord ou à raison que je devrais peut-être tenter d’aider ceux dans le besoin au lieu de chercher à m’aider car je sais que je serais malade jusqu’à la fin. Au lieu de me détruire instantanément je peux rendre service. Finalement, ma misanthropie me pousse vers l’assistance à autrui au lieu de m’inviter à rester dans mon coin. Serais-ce le moyen de donner un ultime sens à ma vie avant que celle-ci n’expire ?
« Nul n'est plus misanthrope qu'un adolescent déçu. »